Une main sort d'un champs de blé comme un appel à l'aide à sa communauté.

Quel avenir pour le financement participatif de l’après COVID-19?

Alors que les collectes de fonds explosent sur GoFundMe, le géant du financement participatif Kickstarter est contraint de réduire ses effectifs. Bien connu et apprécié des artistes et des start-up, c’est moins son modèle (axé sur les récompenses) que sa manière de joindre et de soutenir ses clientèles potentielles qui devrait être repensée. Des plateformes d’ici telles que La Ruche pourraient peut-être inspirer l’entreprise basée à Brooklyn.

Ce n’est une surprise pour personne : la vulnérabilité, voire l’incohérence, de certaines entreprises ont été exacerbées par la pandémie. Les exemples abondent dans de nombreux secteurs d’activité dont celui de la finance participative, qui pourrait pourtant jouer un rôle considérable là où le filet de sécurité sociale s’avère inadéquat.

Santé et esprit de marché

GoFundMe, « la plateforme numéro 1 de collecte de fonds sans frais », a enregistré le plus grand nombre d’inscriptions depuis sa création en 2010. On s’y inscrit dans l’urgence, soit pour se payer des soins de santé, de la nourriture, un nouveau toit, des funérailles… Chaque campagne sur cette plateforme est un cri de détresse qui espère devenir viral.

Entre le 20 et le 24 mars, le nombre de campagnes reliées au coronavirus a augmenté de 60% pour se chiffrer à 35 000, apprend-on dans cet article du New York Times. En revanche, la popularité de la plateforme n’est pas garante du succès des collectes qu’elle héberge; toutes et tous n’ont pas la chance de pouvoir compter sur une personnalité publique ou un influenceur pour partager leur campagne sur leurs médias sociaux.

L’injonction à la visibilité performante fait partie de la game sur GoFundMe, nonobstant la gravité des situations. Les cris de détresse demeurent souvent silencieux, illustration désolante de la mauvaise qualité de gouvernance de cette plateforme qui véhicule des valeurs de solidarité et d’entraide  (c’est son pain et son beurre), alors que son moteur consiste à tirer profit des réseaux des utilisateurs… au détriment de ceux qui en ont peu ou pas.

Je souligne que le montant obtenu est généralement déterminé par la taille et la mobilisation du réseau.

Pour poursuivre la réflexion sur le rôle de GoFundMe, car il y en a long à dire et à débattre sur le sujet, je suggère la lecture de ce texte dans le Washington Post, Crowdfunding is an imperfect weapon against pandemic, dans lequel le spécialiste affirme :

« Crowdfunding is rarely a fair or ethical solution to complex problems. About 90 percent of medical campaigns fail to reach their goals — and those that succeed may not represent the most urgent or important needs. Each campaign competes in a marketplace of need for donor dollars and attention.»

Vers des Kickstarter locaux?

Kickstarter se trouve dans une situation tout à fait différente, et sa clientèle l’est tout autant. Ces jours-ci, la plateforme est acculée à une singulière impasse : depuis quelques semaines, les nouveaux projets se font moins nombreux, ce qui affecte directement les revenus. Dans le milieu, cette plateforme domine au sommet de la hiérarchie crowdfundienne, avec Indiegogo, Patreon et GoFundMe non loin derrière.

« Although projects on the site continue to garner plenty of support from backers, we’ve seen many fewer projects launch on the platform over the last several weeks. The live project count is about 35% below what it was at this time last year with no clear sign of rebound. As a result, our pledge volume and revenue are tracking sharply down as well.» – Aziz Hasan, CEO de Kickstarter.

Bien sûr, des initiatives de relance ont été explorées, comme la prolongation des campagnes en cours. C’était la chose à faire pour sauver certains projets à bord. Malheureusement, elle se prépare à réduire de 45 % ses effectifs.

Comme on sait que les artistes ont été parmi les premiers frappés par la crise économique, on peut aisément conclure que les outils leur permettant de financer leurs idées en subissent les contrecoups. Et si ces entreprises de l’innovation revenaient à leurs principes directeurs en demandant à la foule : que veux-tu?

Mais comme la futilité n’a plus sa place, la question pourrait être : de quoi avons-NOUS besoin?

Si certaines entreprises en financement participatif doivent se « réinventer », c’est peut-être en proposant davantage de solutions participatives. Le mouvement d’entraide que nous observons présentement peut (re)devenir son moteur permanent et préserver cette économie alternative.

La Ruche Grand Montréal fait figure d’exemple à suivre. Lancées il y a quelques semaines, les campagnes Soutenons nos commerces permettent aux citoyens des quartiers Hochelaga-Maisonneuve, Verdun et Griffintown de soutenir leurs commerces de proximité en achetant des bons d’achat, en plus de profiter d’une récompense de 10$ (offrir quelque chose de concret en retour d’un don est un principe cher au financement participatif).

Facile à communiquer, en parfaite adéquation avec les besoins des communautés, car elles ont été approchées, cette initiative démontre que les plateformes elles-mêmes, grâce à leurs compétences et leurs propres réseaux, peuvent sauter dans l’arène et provoquer l’impulsion nécessaire à la mobilisation citoyenne.

Je reviens à la question principale : quel avenir pour le financement participatif  (à la Kickstarter) de l’après COVID-19? S’il parvient à incarner à nouveau ses valeurs d’origine – sans nécessairement faire table rase de ses services actuels – je dirais qu’il n’ y a pas meilleur moment pour prouver sa pertinence.

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